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L a fiscalité internationale est au coeur des débats actuels. En effet, la fiscalité internationale concerne chaque individu, chaque entreprise, chaque État. Il suffit de se pencher sur les médias pour voir les sujets qui reviennent encore et toujours : les affaires SwissLeaks, LuxLeaks, Starbucks, Apple, Amazon et j’en passe des centaines et des milliers, voire des centaines de milliers !
Mais qu’en est-il exactement ? Pourquoi existe-t-il une telle pression entre les États ? Qu’est-ce que cette fameuse fiscalité internationale ?
Pour s’en rendre compte, il faut se placer à l’échelle mondiale et ne plus imaginer de simples relations entre acteurs économiques au sein d’un même État.
Les individus et entreprises réalisent de nombreuses opérations dans de multiples pays différents. Par exemple une multinationale américaine dispose de son siège sur le territoire américain, mais elle possède de nombreuses filiales à travers le globe. De la même façon, un individu peut posséder un immeuble dans un autre pays, et dégager de cet immeuble des revenus fonciers.
Dans ces cas, quels États doivent/peuvent imposer sur les bénéfices des filiales et sur les revenus des immeubles situés à l’étranger ?
Chaque État étant souverain, il peut décider d’imposer ou non toutes sources de revenus ou bénéfices. Et d’ailleurs, le CGI ne se gène pas puisque l’article 4A précise bien que les résidents fiscaux français doivent soumettre à l’impôt sur le revenu l’ensemble de leurs revenus mondiaux.
En outre, quand bien même l’individu ne serait pas résident fiscal français, ce même article précise que les non-résidents doivent soumettre à cet impôt leurs revenus de source française.
Étant donné que chaque État dispose de ces même principes sur son territoire, il en résulte une double imposition. Tout d’abord par l’État dans lequel se situe (dans notre exemple) l’immeuble qui génère des revenus fonciers, puis dans un second temps par l’État dans lequel est résident fiscalement le propriétaire de l’immeuble.
La fiscalité internationale met en place un système permettant d’éviter cette double imposition.
Ce système repose sur l’utilisation de conventions fiscales passées entre deux États. Ces conventions vont déterminer quel est l’État qui possède le droit d’imposer ou non sur chaque type de revenus/bénéfices.
La double imposition
Comme je l’ai mentionné plus haut, la justification légale qui donne à un État le pouvoir de taxer est le principe de souveraineté.
Il existe deux aspects de cette souveraineté :
- la souveraineté nationale qui s’applique à tous les citoyens et résidents d’un État. Cette souveraineté permet à l’État de soumettre les résidents et citoyens aux lois du pays, donc aux impôts du pays ;
- la souveraineté territoriale qui permet à l’État de soumettre chaque personne à ses lois, quand bien même ces personnes ne seraient ni résidentes, ni citoyennes (un étranger qui commet un délit/crime sur le sol français est soumis aux juridictions pénales françaises).
D’une manière quasi globale, les États ont basé leur système d’imposition autour de deux principes : le lieu de source du revenu et celui de résidence du contribuable.
Ainsi, l’État sur lequel se situe la source de revenu possède le droit primaire d’imposer, et l’État dans lequel se situe le résident possède un droit résiduel d’imposer.
L’État de résidence a donc la capacité d’imposer les revenus mondiaux du résident (en France, article 4A du CGI). Ainsi, si l’État de la source de revenu n’a pas une compétence exclusive d’imposer (selon le traité fiscal passé entre les deux États), l’État de résidence possède un droit résiduel d’imposer. De la même façon, l’État de résidence a l’obligation d’éviter la double imposition.
L’État de source du revenu a la capacité d’imposer les revenus générés sur son territoire (principe de la souveraineté territoriale). Toutefois, certains États peuvent librement décider de ne pas imposer les revenus issus de son territoire et qui repartent vers l’État de résidence du contribuable. Je pense notamment à la pratique du Luxembourg, mais cela fera l’objet de différents articles.
Les différentes formes de double imposition
- Tout d’abord nous trouvons la double imposition juridique. Il s’agit d’impôts comparables réalisés par plus d’un État sur le même contribuable sur le même revenu ou capital sur la même période. Cette double imposition résulte le plus souvent des impôts et taxes effectués sur les transactions financières entre les différents pays.
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Puis il y a la double imposition économique. Cette fois-ci il s’agit d’un même revenu ou capital soumis à des impôts comparables par plus d’un État sur la même période, MAIS dans les mains de différents contribuables.
Les raisons d’une double imposition
- Une imposition à la fois dans l’État de source du revenu et dans l’État de résidence du contribuable. Exemple : une entreprise située dans l’État A réalise des revenus tirés d’une activité de location d’immeubles situés dans l’État B. L’entreprise est imposée dans l’État A au titre de l’ensemble de ses revenus, même ceux situés à l’étranger (principe de souveraineté nationale, la mondialité de l’impôt). Mais l’État B va également imposer les revenus tirés de la location des immeubles situés sur son territoire (principe de souveraineté territoriale).
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La double imposition peut également résulter d’une double résidence. Chaque État considère que la personne concernée est résidente dans son État. Cette personne (physique ou morale) sera donc redevable de l’ensembles de ses revenus tirés à travers le monde dans les deux États concernés …
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Deux États à la source du revenu peuvent créer une situation de double imposition. Rien de mieux qu’un exemple pour comprendre la situation : une entreprise A résidente dans l’État A prête de l’argent à une société C située dans l’État C au travers de son établissement stable situé dans l’État B. Ici, l’État C peut prélever un impôt à la source sur les intérêts reversés par la société C à l’établissement stable de l’entreprise A situé dans l’État B. Et l’État B peut également prélever à la source les revenus distribués par l’établissement stable de A situé sur le territoire de l’État B vers l’entreprise A.
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Un problème de qualification juridique peut également être la cause d’une situation de double imposition. Il s’agit notamment des structures hybrides et des instruments financiers hybride. À titre d’exemple, une société A résidente dans l’État A octroie un fonds à sa filiale B située dans l’État B grâce à un instrument financier hybride (l’instrument possède à la fois les caractéristiques d’un capital, mais également d’une dette). L’État B considère qu’il s’agit d’un capital, la remonté d’argent vers la société A sera dès lors considérée comme des dividendes (non déductibles dans l’État B) alors que l’État A considère qu’il s’agit de dette, cette rentrée d’argent est donc considérée comme des intérêts (imposable dans l’État A). Petites infos bonus, la situation inverse serait un cas de double non-imposition. Ne vous inquiétez pas, je vous livrerai les secrets de la double non-imposition dans de futurs articles ;-)
Vous l’avez donc compris, l’enjeu de la fiscalité internationale se situe dans la double imposition.
Et ce sont les conventions fiscales passées entre les États qui apportent des solutions pour éviter les doubles impositions. Mais une utilisation abusive des ces conventions peuvent conduire à créer une situation de double non-imposition.
Ainsi, dans de prochains articles je vous expliquerai ce qu’est en détail une convention fiscale. Puis je vous apprendrai à lire une telle convention. Et enfin, je vous livrerai les secrets pour créer une situation de double non-imposition bien maitrisés par certains pays et acteurs économiques.
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El fadili
Envoyé le 10/05/2022Antoine Gouin
Envoyé le 25/05/2022